La nomination de la diplomate marocaine Amina Selmane comme représentante permanente de l’Union du Maghreb arabe (UMA) auprès de la Commission l’Union africaine (CUA) a déclenché à Alger une colère contre les deux organisations, régionale et continentale. L’UMA a réagi mardi pour démonter une à une les fallacieuses allégations de la diplomatie algérienne.
Le président de la Commission de l’Union africaine (UA), le Tchadien Moussa Faki Mahamat, a reçu, jeudi 13 avril 2023 la diplomate marocaine, Amina Selmane, qui lui a présenté ses lettres de créance en tant que représentante permanente de l’UMA auprès de la Commission.
Cette nomination n’a pas été du goût de l’Algérie qui s’est fondue, dimanche 16 avril 2023, dans un communiqué dans lequel son ministère des Affaires étrangères a exprimé son profond étonnement face à la décision « désinvolte » et « irréfléchie » du président de la Commission de l’Union africaine (CUA), Moussa Faki Mahamat, de recevoir les « lettres de créances » de cette diplomate.
Pour le ministère algérien, la diplomate marocaine s’est présentée « faussement » comme représentante de l’UMA.
« Ce comportement irresponsable est d’autant plus inadmissible qu’il intervient après des démarches pressantes des autorités algériennes auprès de la Commission de l’Union Africaine, afin de considérer sans objet cette prétendue nomination qui, conformément aux textes régissant le fonctionnement l’Union du Maghreb Arabe, ne relève aucunement des prérogatives du Secrétaire général de l’UMA, dont l’ultime mandat a définitivement pris fin le 1er août 2022, sans possibilité de prorogation », a dénoncé le ministère algérien.
L’Algérie tient à « clarifier qu’elle n’a jamais été consultée au sujet de cette nomination qui s’est faite en dehors des règles prévues par le Traité instituant l’UMA de février 1989 ».
«Ces règles exigent dans le cas d’espèce le vote à l’unanimité des Etats-membres au niveau du Conseil des ministres des affaires étrangères de l’UMA, seule instance habilitée à statuer aussi bien sur cette nomination que sur l’établissement de relations de coopération avec d’autres groupements régionaux et internationaux, tel que prévu notamment par l’article 6 du Traité instituant l’UMA, les articles 5 et 7 du Statut général fixant les attributions du Secrétaire général de l’UMA ainsi que par la résolution du Conseil de la Présidence datant du 23 février 1990 », a ajouté la même source .
Poursuivant, le même document a affirmé que l’Algérie réfute également le qualificatif « d’intérimaire » utilisé par la Commission de l’Union Africaine comme « artifice juridique » pour traiter avec l’ancien Secrétaire Général de l’UMA et « tient à souligner que le Traité de février 1989 instituant l’UMA ne prévoit aucunement cette position ». L’Algérie s’en prend également à Moussa Faki Mahamat.
« En acceptant cette grossière mise en scène protocolaire, le président de la Commission de l’Union Africaine cède à une opération de manipulation malsaine, conçue et mise en œuvre à des fins ne servant aucunement les intérêts de l’Union du Maghreb Arabe et de l’Union Africaine, auxquelles l’Algérie réitère son attachement indéfectible », a estimé la même source.
Et d’ajouter : « L’Algérie attend de la Commission de l’UA qu’’elle clarifie sa position définitive sur cette violation flagrante et inacceptable des règles protocolaires et juridiques, sans préjudice de mesures éventuelles en fonction de l’évolution de cette affaire ».
En réaction, le Secrétariat général de l’UMA a, dans un communiqué publié mardi 18 avril 2023, dit regretter les propos déplacés tenus par les autorités algériennes contre le commissaire africain, traité de « téméraire » et d’irresponsable pour peu qu’il ait reçu les lettres de créance. L’attitude algérienne est d’autant plus inadmissible aux yeux du Secrétariat général de l’UMA que Moussa Faki a reçu la nouvelle présidente de représentante maghrébine dans le cadre de l’exercice de ses fonctions.
Le SG de l’UMA a rappelé que le cadre légal de l’UA stipule que les groupements régionaux doivent nommer un représentant permanent. Raison pour laquelle le Commissaire africain a reçu officiellement les lettres de créance présentées par Amina Selmane. Celle-ci, poursuit le communiqué, a d’ores et déjà prêté serment devant le Secrétaire général de l’UMA, Taïeb Baccouche, en tant que Directrice des Affaires économiques au sein du Secrétariat général.
L’UMA a également rappelé les règles de base de la diplomatie. « La diplomate marocaine travaille pour le compte de l’instance maghrébine et ne défend nullement les intérêts de son pays d’origine qui a soutenu sa candidature », explique la même source.
Le secrétariat général de cette instance régionale n’a pas manqué de rappeler dans son communiqué publié mardi que sur les cinq pays composant le Maghreb arabe, il n’y a que l’Algérie qui se dérobe à ses engagements. Alors que le Maroc, la Tunisie, la Mauritanie et la Libye sont à jour de leurs cotisations financières jusqu’en 2022, l’Algérie, elle, n’a pas honoré ses contributions depuis 2016.
Plus encore, Alger « a retiré tous ses diplomates accrédités à l’UMA, dont le dernier a quitté ses fonctions en juillet 2022. Tous ont joui de leurs droits et solde en puisant dans les contributions des autres États membres », précise le communiqué du SG de l’UMA, tout en formulant le vœu de voir « l’attachement témoigné par l’Algérie se concrétiser par le règlement du restant dû et par le retour des diplomates rappelés ».
Quant à la décision d’ouvrir sa représentation à l’UA, saluée par le SG de l’UMA, celui-ci rappelle dans son communiqué « qu’elle a fait l’objet d’un accord avec le président de la Commission de l’UA Moussa Faki Mahamat en janvier 2018 », et que « cet accord a fait l’objet d’une large information sans que nul n’y oppose de réserve ».
L’exécution de cet accord a cependant été suspendue suite à la pandémie de la Covid-19 et donc «ce n’était que partie remise et nous avons enfin pu nommer la directrice des affaires économiques au secrétariat général de l’UMA, dans un contexte où les Communautés économiques régionales (CER) sont considérées par l’UA comme ses piliers essentiels dans la mise en œuvre de son Agenda 2063, notamment en matière d’intégration économique continentale, dont le préalable est l’intégration régionale», souligne le communiqué.
HA/APA