La responsabilité de ces meurtres est partagée entre les groupes jihadistes et les forces armées maliennes, selon le rapport de Human Right Watch.
L’ONG « Human Rights Watch, dans un document produit, ce jeudi 2 novembre, a recensé au moins 200 civils tués au Mali depuis avril dernier. Selon HRW « les forces armées maliennes et des groupes islamistes armés ont tué et commis d’autres abus contre de nombreux civils dans le centre et le nord du Mali depuis avril 2023 ». Elle a également appelé les autorités de Transition à mener de toute urgence des enquêtes crédibles et impartiales sur les abus présumés et demander des comptes aux responsables. Pour ce faire, l’ONG a sollicité le soutien de la Commission nationale des droits de l’homme et des experts internationaux des droits humains.
Depuis le début du mois d’avril, HRW indique que des combattants islamistes du Groupe pour le soutien de l’islam et des musulmans (GSIM), lié à Al-Qaïda, ont tué plus de 160 civils, dont au moins 24 enfants. Elle reproche aussi aux forces armées maliennes d’être responsables de la mort d’au moins « 40 civils, dont au moins 16 enfants, au cours d’opérations de contre-insurrection ». L’ONG souligne aussi que le gouvernement malien n’a pas pris de mesures adéquates pour protéger les civils dans les zones touchées par le conflit.
« Les meurtres ciblés de civils par les groupes islamistes armés et l’armée malienne constituent des crimes de guerre qui doivent faire l’objet d’enquêtes approfondies et impartiales », a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à Human Rights Watch. « Les autorités maliennes devraient demander à des experts régionaux et internationaux indépendants des droits humains de soutenir les autorités judiciaires maliennes afin que les responsables de ces crimes graves rendent des comptes ».
Pour la réalisation de cette enquête, Human Rights Watch précise qu’entre août et septembre, elle a mené des entretiens téléphoniques avec 40 personnes ayant eu connaissance d’attaques menées par l’armée malienne et par des groupes islamistes armés. Parmi ces personnes figurent 33 témoins d’abus, ainsi que des membres de groupes de la société civile malienne et d’organisations internationales. De plus, elle a noté avoir envoyé, le 9 octobre, des lettres aux ministres maliens de la Justice et de la Défense présentant en détail ses conclusions et posent des questions sur les allégations d’abus. Ces lettres qu’elle estime être « restées sans réponse ».
L’organisation non gouvernementale n’a pas mentionné le cas du groupe « Etat Islamique au Grand Sahara » (EIGS) devenu Etat Islamique au Sahel (EIS). Pourtant, ce groupe est responsable de la mort de plusieurs dizaines de civils notamment dans les régions de Ménaka et une partie de Gao. Il opère surtout au niveau des localités situées dans la zone dite des « trois frontières » ou encore du Liptako Gourma regroupant le Mali, le Burkina Faso et le Niger qui ont formé, le 16 septembre dernier, une nouvelle plateforme dénommée Alliance pour les Etats du Sahel (AES). Une initiative qui a souscrit parmi ces objectifs la lutte contre le terroriste qui ne cesse de sévir dans ces pays de sévir avec son important lot de victimes civiles.
D’après Armed Conflict Location & Event Data (ACLED) un projet de collecte de données, d’analyse et de cartographie des crises, entre janvier et août , la violence contre les civils au Mali avait augmenté de 38 % par rapport à 2022 et que le GSIM, les forces armées maliennes et le groupe Wagner, ainsi que l’EIGS étaient les principaux assaillants.
Depuis la fin du mois d’août, la sécurité dans le nord du Mali s’est par ailleurs fortement dégradée après la reprise des hostilités entre les rebelles du CSP-PSD, une alliance de mouvements armés impliqués dans le processus de paix et l’armée malienne. Une situation qui intervient dans un contexte où la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) qui avait dans son mandat l’interposition entre les belligérants, ne s’occupent plus que de son retrait qui doit être effectif au plus tard le 31 décembre prochain.
Pourtant, tous ces crimes ne devraient pas rester impuni puisque le Mali est un État partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, qui a ouvert une enquête sur les crimes de guerre présumés commis au Mali depuis 2012. Déjà, deux Maliens qui ont été jugés à la CPI en l’occurrence Ahmad Al-Faqi Al-Mahdi, pour la destruction de mausolées à Tombouctou lors de la crise de 2012 et Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud, transféré à la CPI depuis le 31 mars 2018 et accusé de crimes liés à sa fonction de commissaire islamique de Tombouctou durant l’occupation de la ville par les groupes djihadistes en 2012 et 2013.
MD/ac/APA