Après avoir quitté la prison pour le palais de la République, il y a deux mois, le président Bassirou Diomaye Faye a engagé des réflexions inclusives pour une justice plus juste.
Au Sénégal, le dialogue national sur la réforme et la modernisation de la justice a été ouvert mardi 28 mai à Diamniadio, à une trentaine de kilomètres de Dakar. Les travaux dureront une semaine avant la présentation du rapport, le 4 juin prochain, à Bassirou Diomaye Faye. Le chef de l’Etat a présidé la cérémonie d’ouverture en présence de plusieurs citoyens qui travaillent dans la justice ou qui ont eu maille à partir avec elle.
Si la justice est fortement décriée ces dernières années, il a tenu à préciser que cette réunion n’était pas « un procès en inquisition » pour désigner un ou des coupables à jeter aux orties. « Il est plutôt question de tenir un débat lucide et serein, posé et apaisé pour ausculter notre système judiciaire, identifier ses forces et faiblesse, et rechercher ensemble les solutions aptes à refonder son fonctionnement à améliorer ses performances », a indiqué le président Faye qui a passé près d’une année en prison sous le régime de son prédécesseur Macky Sall pour avoir publié un post Facebook s’indignant du comportement de certains magistrats.
Pour ce dialogue national qui réunit des professionnels de la justice, des personnalités de la société civile et même des anciens détenus, les thématiques abordées sont nombreuses et variées. Outre le statut des magistrats et l’organisation et le fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature, la dématérialisation du service public de la justice, la justice et le numérique, le temps du procès pénal et le régime de la sanction pénale intéresseront les participants.
Il sera question aussi du cadre juridique et institutionnel de l’administration pénitentiaire, des conditions de détention et de préparation à la réinsertion sociale des détenus, du régime de la privation de liberté, de la prise en charge des enfants en danger ou en conflit avec la loi, selon le président Faye qui dit accorder une « priorité élevée » à la concertation comme mode de gouvernance des affaires publiques.
C’est dans cette logique d’ailleurs que le gouvernement a lancé, le 23 mai dernier, la plateforme électronique +Jubbanti+ (redresser) « comme vox populi pour recueillir les contributions citoyennes ». « La justice étant rendue au nom du peuple, il est donc pertinent que le peuple ait son mot à dire sur la manière dont elle doit être rendue », a souligné Bassirou Diomaye Faye, espérant à travers cette approche inclusive de réflexion « baliser la voie pour une réforme pragmatique de notre système judiciaire afin qu’il inspire davantage confiance au justiciable et préserve sa dignité ».
« Nous devons travailler à mettre en place un système plus transparent de gestion de la carrière des magistrats, à définir un régime de privation de liberté mieux encadré, à aménager un dispositif législatif et institutionnel de nature à favoriser la célérité dans le traitement des procédures judiciaires et à humaniser l’univers carcéral », a recommandé le chef de l’Etat de 44 ans avant de mettre en garde contre le fait de vouloir limiter la réforme et la modernisation du système judiciaire « au volet pénal » et « oublier les affaires civiles ».
« Gardons-nous de vouloir bâtir une République des juges qui remettrait en cause le principe cardinal de la démocratie, à savoir le gouvernement du peuple, par et pour le peuple, en vertu duquel les élus restent les dépositaires légitimes du pouvoir étatique. Je suis conscient que nous pouvons y parvenir par une concertation sereine, ouverte et apaisée », a dit Bassirou Diomaye Faye.
ODL/ac/APA