La Journée mondiale de la pêche, célébrée chaque 21 novembre, a été l’occasion pour les acteurs de ce secteur de remonter leurs difficultés à la surface.
Thiaroye-sur-mer. C’est le genre de jour où, habituellement, le calme règne dans cette commune de la banlieue de Dakar. Mais dimanche 21 novembre, un puissant son de tam-tams, venu du quai de pêche, raisonne dans la cité. En bon chef de troupe, Malick Niass dicte le tempo. Et des femmes dansent au rythme du « Goumbé » et du « Ndawrabine », des sonorités de la communauté léboue, les habitants historiques de cette partie du Sénégal.
Venues de diverses localités du pays, les transformatrices de produits halieutiques sont aux anges. Certaines, emportées par l’euphorie du moment, s’invitent à la danse. L’ambiance est à son comble, mais elle sera de courte durée.
La cause ? Ce qui les rassemble n’a rien de réjouissant. Il est question de la détresse ambiante dans le secteur de la pêche. Le poisson, qui fait vivre de nombreuses familles, est de plus en plus rare. Au banc des accusés, les chalutiers et les usines de farine de poisson.
Les premiers surexploiteraient les ressources et les seconds extermineraient les jeunes poissons. « Des Sénégalais désespérés vendent leurs pirogues. Ils ne gagnent plus rien car les navires de pêche raflent tout », a dénoncé avec véhémence la présidente du réseau des femmes mareyeuses et transformatrices de produits halieutiques du Sénégal, Diaba Diop Niang.
Cette dame a jugé « scandaleux » le fait que le Sénégal, dont les eaux étaient autrefois riches en poissons, soit aujourd’hui obligé d’en importer pour satisfaire la demande nationale. « L’Etat doit arrêter d’octroyer des licences aux bateaux étrangers et interdire la pêche artisanale illégale », a proposé Diaba Diop Niang.
Elle a soutenu que le repos biologique des espèces halieutiques doit aussi être respecté pour laisser aux poissons le temps de se reproduire. Dans ce sens, Madame Diop Niang a invité le gouvernement à finaliser le projet de décret régissant le domaine.
Ce texte, a-t-elle déclaré, devrait également permettre aux associations de femmes de se formaliser pour bénéficier de financements essentiels au développement de leurs activités.
Lui aussi indigné, Dr Aliou Ba, le responsable de la campagne « Océans » de l’ONG Greenpeace Afrique, a affirmé que « plus d’un demi-million de tonnes de poissons sont pêchés chaque année dans les eaux ouest-africaines pour ensuite être transformés en farine et en huile de poisson dans l’unique but de nourrir les poissons d’élevage, le bétail et les animaux domestiques en Asie et en Europe ».
Si cette pratique perdure, a averti M. Ba, « nous risquons de nous retrouver en insécurité alimentaire parce que les populations seront privées de 75 % d’apport en protéines des poissons ». Pour éviter cela, Dr Aliou Ba a exhorté l’Etat du Sénégal à geler les nouvelles autorisations d’implantation d’usines de farine de poisson et à fermer toutes celles qui utilisent du poisson frais propre à la consommation humaine.
ARD/id/APA