Une grosse polémique a vu le jour au Tchad où les organisations des Droits de l’homme et les opposants dénoncent vivement les propos du chef de l’État, Idriss Déby, qui parlant des conflits interethniques à l’est du pays, a conseillé aux forces de l’ordre de tirer sur tout protagoniste refusant de déposer son arme.
« Après trois sommations, si un assaillant ne s’arrête pas, tuez-le ! », a martelé le président Déby, dans une allocution prononcée dimanche à l’est du Tchad où il effectue une tournée.
Le président tchadien a également instauré l’état d’urgence pour une période de trois mois, une autre mesure destinée à mettre fin aux conflits intercommunautaires ayant fait une centaine de morts ces derniers mois entre agriculteurs et éleveurs qui habitent non loin de la frontière avec le Soudan.
Plus que cette dernière mesure, celle consistant à tirer « après sommation » sur tout récalcitrant a choqué les défenseurs de droits de l’homme, la classe politique ainsi que beaucoup de Tchadiens.
Ainsi, le secrétaire général de la Convention Tchadienne de Défense des Droits de l’Homme (CTDDH), Mahamat Nour Ibedou s’est dit profondément scandalisé par l’appel au massacre des civils lancé par Idriss Déby.
Selon Ibedou, le président Déby a aussi ordonné aux militaires « de façon expresse qu’en cas de nouveau conflits, ceux-ci ont le feu vert pour tuer 10 personnes de chacune des parties en belligérance ».
« Cette déclaration au demeurant irresponsable et extrêmement dangereuse est révélatrice de l’état d’esprit d’un individu pour qui la vie humaine n’a toujours jamais compté. La CTDDH estime que cette instruction est d’autant plus grave qu’elle s’adresse à des militaires analphabètes sans foi ni loi et qui trouveront là une occasion pour se livrer à des massacres gratuits et extra judiciaires », a déploré Mahamat Nour Ibédou.
Pour sa part, l’opposant Saleh Kebzabo a martelé : « Cet appel au meurtre qui autorise une situation de non droit est inacceptable. Pour résoudre ces conflits, il faut donner force à la loi, tout court ».
Tout en qualifiant Déby de « dictateur », un autre opposant, Mahamat Ahmad Alhabo, a accusé le chef de l’État de fragiliser « de manière gravissime les institutions et surtout la justice, pilier essentiel d’un véritable Etat de droit ».
De simples citoyens ont, eux, appelé les organisations non gouvernementales et les défenseurs des droits humains à documenter chaque mort par balle à Sila et à Ouaddaï, les deux provinces de l’est où sévissent les conflits interethniques
AHD/cat/APA