Après le long week-end de la Tabaski, les journaux camerounais parus mardi commentent amèrement l’immense panne d’électricité dont est victime la capitale, Yaoundé, non sans s’attarder sur une scène politique tout aussi tourmentée.
Sa couverture, à la place de la photo habituelle, est barrée par une grosse bande noire surmontée du titre «Yaoundé : de l’électricité dans l’air». C’est que, explique le quotidien à capitaux privés Mutations, depuis mercredi 7 août dernier, les coupures intempestives d’énergie électrique sont redevenues régulières dans la ville.
Pendant cette panne géante, constate la publication, l’alimentation prioritaire est dédiée aux zones sensibles telles que les hôpitaux et les infrastructures de distribution de l’eau situées dans le périmètre du sinistre, un service de rationnement étant par ailleurs d’ores et déjà mis sur pied pour éviter d’abandonner certains quartiers à leur triste sort.
Avec le même rectangle noir en grande manchette, Émergence explique qu’en réalité, cela fait 37 ans, comprenez depuis l’accession au pouvoir de Paul Biya, que le Cameroun, gâté par la nature, 2ème potentiel hydroélectrique d’Afrique après la République démocratique du Congo (RDC), broie du noir, s’éclairant aux grands projets et discours des dirigeants.
Yaoundé voit noir, soupire La Voix du Centre alors que, dans Le Soir, le ministre de l’Eau et de l’Énergie, Gaston Eloundou Essomba, tente une explication à travers l’incendie d’un poste de transformation.
S’agissant du calendrier des délestages, le quotidien à capitaux publics Cameroon Tribune signale que rien de fixe n’a été arrêté à ce jour, alors que le même membre du gouvernement, de manière vague, y indique que des actions sont en cours dans le sens d’un retour rapide à la normale.
Pendant ce temps, s’insurge L’hebdomadaire La Météo, le ministère de l’Eau et de l’Énergie, l’opérateur Eneo et la Société nationale de transport d’électricité (Sonatrel), loin de jouer collectif, se livrent plutôt à un petit jeu de massacre et à la cacophonie communicationnelle.
Les pannes récurrentes et intempestives d’électricité n’empêchent pourtant pas Paul Biya de soigner son image, dénonce La Voix du Centre, révélant que le chef de l’État «dilapide l’argent public» en recrutant, à coups de millions de dollars, un cabinet de lobbying américain proche des Républicains.
Entre coup de gueule et surenchère, le Front social démocratique (SDF), le premier parti de l’opposition, s’affiche en couverture d’Aurore Plus, Eden, Le Messager et The Guardian Post. Cette formation, au terme d’une session de son bureau exécutif national (NEC), vient d’adresser un avertissement sans frais au pouvoir de Yaoundé : ses élus boycotteront la prochaine session parlementaire si le régime n’engage rien de concret pour résoudre la crise sécessionniste anglophone.
Paul Biya est le principal responsable de la crise anglophone, la spirale de violence inouïe aux conséquences désastreuses, à savoir les assassinats, kidnappings, torture, incendies des écoles et des hôpitaux, villages complètement rasés, des dizaines de milliers de déplacés internes, lui étant entièrement imputable, résume la première publication citée.
Le SDF, ajoute Mutations, a également lancé un appel aux sénateurs, députés et conseillers municipaux du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc, au pouvoir) des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, qui affichent jusqu’ici une indifférence assourdissante et apportent leur soutien au gouvernement répressif de Yaoundé.
Pour L’Anecdote, tout ceci relève d’un odieux chantage du leader de l’opposition, Ni John Fru Ndi, qui cède ainsi aux pressions exercées contre lui depuis des mois par les séparatistes anglophones qui, rappelle The Guardian Post, l’ont déjà pris en otage à deux reprises en exigeant qu’il retirer ses élus du Parlement.
FCEB/cat/APA